Entre une société
brinquebalante et la possibilité de relire Rousseau et David Thoreau, la nature
est une ouverture à la mode. Dans un monde chaotique où l’on respire de moins en moins bien
(dans tous les sens du terme), un homme est sur le point de se suicider. Un fusil, une balle dans la gorge. Seul, désespéré, dans une montagne déserte
en automne. Car l’automne sied bien au désespoir. C’est en
apercevant un cheval au bord d'un ruisseau au loin… que le héros du film, seul comédien de ce huis clos
à ciel ouvert, a comme une vision heureuse, un sursaut de vie… Cet homme sans
nom et sans voix, va retrouver le goût. Retrouver la vitalité
à travers un périple dans cette superbe montagne catalane. Ses sous-bois, ses étangs
et ses prairies.
La vie dans les bois
Au gré des saisons, il s’alimente comme il peut, se réchauffe comme il peut, s’abrite de la pluie sous les rochers. Il se construit même une cabane à l’aide d’outils qu’il trouve dans une vieille grange.
Tout le film
est une odyssée à l’intérieur d’un homme coupé du monde de béton. Mais pas si
seul… La nature devient sa compagne. Contrairement au tragique Into the Wild (Sean Penn, 2007), El Perdido, inspiré
d’une histoire vraie (comme Into
the Wild), est une ode au bonheur nu, à la tranquillité, à la solitude salvatrice, à la vie dans les bois, pour citer Henri David
Thoreau. Et celui qui voulait perdre sa vie, la retrouve mieux que jamais au fil des saisons au sein de la nature.
Une histoire sans paroles
Une histoire où
l’on entre, ou pas. Si l’on est un amoureux des dialogues au cinéma, on ira
voir autre chose. Le film est de bout en bout silencieux, le comédien Adri Miserachs n’émet même
aucun son durant 1 h 40 de pellicule.
Mais si l’on
apprécie de se laisser bercer par la beauté de la nature (et les sons qu’elle produit),
on ne manquera pas d’aller voir cet opus singulier. Et, malgré quelques clichés (les visages de philosophes grecs découpés dans de
vieux journaux et que notre héros épingle
dans sa cabane…), El perdido est
une belle réflexion sur la condition d’humain, et sur ce que la nature nous
enseigne, nous donne.
Au final, le film du Catalan Christophe Farnarier pose une question qui taraude
beaucoup de gens par les temps qui courent : “Une immersion totale
dans la nature pourrait-elle m’aider à mieux supporter la violence du monde ?...”
© Corinne Bernard, novembre 2016. Parution web vivreamadrid.com
El perdido, un film de Christophe Farnarier, avec Adri Miserachs. En salles en
Espagne le 2 décembre 2016.